Dans le cadre de la grève du 1er février, la FSU 91 et la CGT Education 91 appellent les enseignants d’UPE2A des collèges et lycées de l’Essonne à se rassembler devant la DSDEN à 10h30. La politique éducative à l’œuvre dans le département concernant la scolarisation des élèves allophones nouvellement arrivés est à l’image de toute la politique de tri scolaire et social que nous dénonçons dans les instances de préparation de la rentrée 2024. Pour que l’école soit véritablement inclusive et respectueuse des élèves et de leurs enseignants, nous invitons tous les personnels de l’Essonne à rejoindre leurs collègues d’UPE2A pour réclamer de meilleures conditions de travail et des moyens à la hauteur des besoins grandissants de l’école publique !

 

 

Vous trouverez ci-dessous notre CR de l’AG des enseignants d’UPE2A qui s’est tenue le jeudi 21 décembre à Evry.

 

UPE2A signifie Unité Pédagogique pour Élèves Allophones Nouvellement Arrivés. C’est la circulaire du 02/10/2012 relative à « l’organisation de la scolarité des élèves allophones nouvellement arrivés » qui est le principal texte de référence sur les UPE2A. Elle précise notamment la mission des enseignants UPE2A : gérer l’accueil, l’évaluation, la scolarisation et l’enseignement des élèves qui viennent d’arriver en France. Pour remplir cette mission, ils doivent pouvoir compter sur les CASNAV (centres académiques pour la scolarisation des enfants allophones nouvellement arrivés et des enfants issus de familles itinérantes et de voyageurs) qui leur fournissent des ressources, une formation et des outils spécialisés.

Comme le rappelle la circulaire de 2012, le but de ce dispositif est bien pour la France de respecter son code de l’éducation et ses engagements internationaux. Tous les enfants ont « droit à une scolarité dans les mêmes conditions que les autres, quelles que soient la durée et les modalités du stationnement et de l’habitat, et dans le respect des mêmes règles. »

Or, les professeurs d’UPE2A ont de plus en plus de difficultés à exercer leur métier, en particulier dans les collèges et lycées de l’Essonne. Le 21 décembre dernier à Évry, ils se sont donc réunis en AG à l’appel d’une intersyndicale CGT/FSU. Le but était de lister les besoins et de réfléchir à une action collective pour faire aboutir les demandes auprès de la DSDEN.

 

Des conditions de travail dégradées.

Le travail en UPE2A est très engageant, les collègues débordent souvent de leurs missions. Ils deviennent tour à tour assistant.e social.e, psychologue, coordonateur.ice etc. Souvent, la gestion de l’urgence quotidienne empêche de préparer le long terme et d’accompagner au mieux les élèves et leur famille. Or, face à la difficulté de ce métier, l’institution ne donne pas de réels outils. Les formations du CASNAV sont souvent déconnectées des besoins et descendantes alors qu’il faudrait partir des demandes des collègues. Les personnels témoignent également de leur solitude : isolé.es dans leur établissement, ils sont dans un face à face avec la direction, sans équipe sur leur lieu de travail. Des moments réguliers, centrés sur des thèmes précis, en présentiel pour pouvoir échanger et travailler ensemble sont donc essentiels.

Le soutien institutionnel pourrait aussi passer par la mise à disposition de ressources dédiées aux UPE2A. Le nombre de formateurs est ainsi très inégal suivant les départements. Par exemple, le 91, qui est le deuxième département d’accueil de France, n’a qu’un poste tandis que le 92, le 93 ou le 95 en ont au moins deux. On pourrait même imaginer de constituer un groupe d’enseignants expérimentés qui viendraient en soutien des plus jeunes. Enfin, le CASNAV n’a pas d’assistant.e social.e dédié.e. Un tel dispositif permettrait de ne pas se reposer uniquement sur les moyens existants dans les établissements, souvent déjà insuffisants.

En l’état, le manque de moyens amène à des situations d’une extrême violence comme le montre la rixe qui a eu lieu devant le lycée Ader d’Athis-Mons et qui a provoqué l’émoi de l’ensemble de la communauté éducative. Il faut absolument que le barème des dotations en CPE ou assistant.e social.e prenne en compte la présence de dispositifs UPE2A. De la même manière, les DGH devraient aussi être revalorisées pour permettre des allègements d’effectifs, puisqu’il s’agit de pouvoir accueillir dans des classes des élèves à besoins spécifiques.

 

Un accueil des élèves violent et inefficace.

Jusque-là, les familles qui venaient d’arriver étaient reçues par une cellule d’accueil. Il s’agissait d’accueillir la famille et d’évaluer le niveau de l’élève pour le scolariser dans l’unité UPE2A la plus pertinente au vu de ses besoins.

Au niveau collège, ce dispositif a été supprimé sous prétexte de diminuer le temps d’attente des familles (qui en effet était un vrai sujet). Mais aucune solution satisfaisante n’est proposée à la place. En effet, l’accueil est maintenant pris en charge dans l’établissement de rattachement sans qu’il n’y ait aucun créneau dédié dans l’emploi du temps des collègues. Ils doivent donc intégrer des moments d’accueil sans que ceux-ci soient rémunérés. De plus, ce qui constituait un véritable sas, dans lequel la famille et l’élève étaient écoutés et accompagnés, est remplacé par un simple test de français et un accueil purement administratif. Les collègues voudraient donc retrouver du temps pour pouvoir remplir la mission qui est la leur.

Au niveau du lycée, le problème est différent. Si les cellules d’accueil perdurent, le nombre de places trop limité au lycée empêche les élèves d’être scolarisés une fois l’accueil effectué. Ici, le problème général des sureffectifs rejoint et accentue les problèmes spécifiques des UPE2A. En effet, pour qu’un élève puisse être scolarisé, il faut qu’il dispose d’une place dans le dispositif de l’établissement ainsi que dans une classe de cet établissement. Par conséquent, si les classes sont déjà pleines, il est impossible de l’accueillir. Certains élèves restent ainsi plusieurs mois sans aller à l’école et sans qu’aucune perspective ne leur soit donnée. Pour eux, la DSDEN est même incapable de fournir ne serait-ce qu’un délai aux familles ou aux professeur.es. Pour protester contre ce qu’est devenu l’accueil, le 1er point pourtant de la circulaire définissant leur mission, beaucoup de collègues refusent donc de participer aux cellules d’accueil.

 

Des élèves déscolarisés par l’Éducation Nationale

Le problème du manque de places disponibles ne se joue pas qu’au moment de l’arrivée des élèves UPE2A. À tous les passages importants de leur scolarité, ils risquent la déscolarisation si bien que les collègues estiment à plusieurs centaines le nombre d’élèves UPE2A non scolarisés.  La DSDEN a récemment confirmé cette information.

Le passage de la 3ème à la 2nde est ainsi particulièrement problématique. L’algorithme Affelnet n’est pas public, ce qui empêche les collègues de bien conseiller leurs élèves. Les UPE2A sont considérés comme « public spécifique » et ont donc un barème particulier, défavorable pour le passage en Lycée Professionnel, favorable pour le CAP. D’une part, ce barème est en lui-même discutable pour ce profil d’élève. D’autre part, la difficulté d’entrer en CAP ou en bac Pro incite certains à demander une 2GT pour au moins être scolarisés. Là encore, le manque de places généralisé dans le lycée Pro et l’absence d’ouverture de places en CAP pour l’an prochain pèsent d’autant plus sur les UPE2A que sur les autres élèves. Pour éviter ces situations, les collègues voudraient être invités à assister aux commissions qui déterminent l’orientation en 2nde pour y voir plus clair.

Ces situations de déscolarisation sont toujours dramatiques. La circulaire de 2012 précise bien que « l’École doit aussi être vécue comme un lieu de sécurité par ces enfants et leurs familles souvent fragilisés par les changements de leur situation personnelle. » Au lieu de cela, notre institution vient précariser ces enfants pour qui « arrivée en France » signifie souvent « déscolarisation. »

 

Face à cette situation alarmante, les collègues réunis en Assemblée Générale intersyndicale ont réfléchi à des moyens d’action et ont décidé de se joindre au mouvement de grève nationale du 1er février en se rassemblant à 10h30 devant la DSDEN à Évry pour qu’une délégation puisse être reçue en audience, à 11h30, à l’issue de ce rassemblement. Celle-ci permettrait de mettre sur la table des propositions concrètes pour permettre aux enseignants d’UPE2A de remplir leur mission de manière digne et sans souffrances pour les élèves et les personnels. Ces revendications seraient également une base de travail pour un groupe de travail sur les UPE2A prévu le 5 mars au niveau académique.