Présent.es :

Pour la Préfecture : Mme BLONDEL, directrice de cabinet de la préfète, ainsi qu’un personnel stagiaire.

Pour les OS et le collectif Exilés 91 : Yelena SUSIC et Sarah CORNELIS (FSU 91), Miléna FISSIER-HESNARD et François QUINCHEZ (CGT Éducation 91), Dominique DURAND (RESF 91), Brigitte GABRIEL (UD CGT 91).

 

Cette audience a été demandée par la FSU 91 et la CGT Éducation 91 dans le cadre de la déclaration de la manifestation qui a eu lieu le mercredi 15 octobre à Évry- Courcouronnes et du préavis de grève déposé pour couvrir les personnels d’éducation souhaitant rejoindre la manifestation. La mobilisation avait pour objectif d’exiger la levée de toutes les OQTF prononcées à l’encontre des jeunes scolarisé.es dans les lycées de l’Essonne. À l’origine, la demande d’audience a été adressée à la Préfecture et à la Direction Académique : une demande d’audience conjointe permet de faire pression à la fois sur la Préfecture qui délivre les OQTF et sur l’Éducation Nationale qui laisse la circulaire Retailleau s’appliquer sans protéger ses élèves. La Directrice Académique a refusé d’accorder cette audience, arguant que la question des OQTF relevait du strict périmètre de la Préfète. Ce refus n’est pas isolé et s’inscrit dans la continuité de plusieurs autres refus similaires formulés sur l’année 2024-2025. L’Éducation Nationale, sur cette question pourtant essentielle, comme sur celle des renouvellements de titres de séjour pour ses personnels, refuse d’intervenir et de soutenir les situations que les OS lui signalent.

La délégation reçue a donc commencé par exprimer son regret de l’absence de la Direction Académique à cette audience. Les nombreuses OQTF prononcées à l’encontre des jeunes scolarisé.es en Essonne entraînent en effet une véritable rupture de confiance : l’État, à travers les moyens qu’il donne pour scolariser ses jeunes et grâce à la conscience professionnelle des personnels qui les encadrent, a investi dans des parcours scolaires qui se voient brutalement brisés par une décision injuste et déloyale de la Préfecture. Cette distorsion, voire cette contradiction, entre deux services publics, le service public d’Éducation et le service public de la Préfecture, doit nous inquiéter fortement. Les personnels d’éducation et plus globalement le collectif Exilés 91 appellent à plus de cohérence, plus de justice, plus d’humanité, et exigent une politique en adéquation avec les valeurs de la République que les programmes de l’Éducation Nationale nous demandent d’enseigner. Les OQTF prononcées sont indignes.

La délégation a ensuite rappelé que la mobilisation qui avait eu lieu ce jour était loin d’être négligeable. Cette mobilisation, intergénérationnelle et interprofessionnelle, a opposé aux décisions violentes d’OQTF une grande énergie militante et des valeurs de solidarité. La manifestation qui s’est déroulée de 14h30 à 16h30, depuis la Place des Droits de l’Homme jusqu’à la Préfecture, a rassemblé beaucoup de monde (200 personnes) et a permis l’expression de revendications très claires et très fortes qui continueront d’être exprimées tant qu’elles ne seront pas satisfaites : plus aucune OQTF ne doit être prononcée contre des jeunes scolarisé.es dans notre département, quels que soient leurs parcours et quelles que soient leurs situations !

La délégation a ensuite analysé la brutalité de ces OQTF. Depuis 2020, les jeunes scolarisés arrivaient à être régularisés grâce à une procédure dans Démarches Simplifiées. Depuis janvier 2025, la circulaire Retailleau a opéré un changement très important, vécu comme une véritable rupture. Les demandes de régularisation des jeunes sont désormais traitées comme toutes les demandes d’AES (Admission Exceptionnelle au Séjour). On attire donc les jeunes avec une démarche en ligne, sans les prévenir qu’ils rentrent dans une mécanique implacable qui les rend expulsables. L’ambition politique d’intégration citoyenne est un leurre. Le jeune Celestino, en BTS au lycée Pagnol d’Athis-Mons, est une des victimes de cette nouvelle politique, brutale et inhumaine. Sa situation a suscité une grande émotion au sein de la communauté éducative : enseignants et élèves sont venus massivement exprimer leur solidarité dans la manifestation et réclamer la levée de son OQTF. Celestino n’est malheureusement qu’un exemple parmi des centaines de situations, toutes aussi difficiles, repérées dans le département de l’Essonne. Toutes ces personnes, tou.tes ces jeunes, victimes de maltraitances institutionnelles et administratives, ont des parcours exceptionnels et exemplaires qui forcent le respect.

Plusieurs questions sous-tendent ces constats et ces revendications :

  • Où est l’humanité dans une telle procédure ?
  • La préfecture a-t-elle des quotas d’OQTF à atteindre ?
  • La préfète, nouvellement arrivée, appliquera-t-elle la même politique que sa prédécesseuse ?

À toutes ces questions, la directrice de cabinet de la Préfète répond, d’abord avec une certaine naïveté, qu’elle comprend parfaitement notre indignation et notre colère. Elle répond que nos interrogations et nos revendications sont légitimes, que personne ne peut dire que ces jeunes ne sont pas méritants. Seulement voilà, la Préfecture doit respecter une réglementation et les lois. Les réponses qui ont suivi ne manquent pas de cynisme. Selon elle, il n’est malheureusement pas possible de donner des titres de séjour à tout le monde. La Préfecture a donc des « volumes d’OQTF » à respecter, OQTF qui sont décidées selon des critères. C’est ainsi, toujours d’après elle, que fonctionnent « toutes les politiques de lutte contre l’immigration … [elle marque une pause et ajoute] irrégulière ».

La délégation a protesté avec fermeté contre les soi-disant critères, évoqués par la directrice de cabinet de la Préfète. Ces critères sont opaques et profondément incohérents. Une élève inscrite en terminale générale avec une moyenne de 12 dans ses spécialités a reçu une OQTF que la Préfecture justifie par un parcours scolaire trop fragile ! C’est inadmissible. Par ailleurs, la situation de certains élèves, en danger de mort dans leur pays, n’est pas prise en compte, en dépit des alertes formulées par l’entourage des jeunes. La condamnation à mort des jeunes serait-elle un critère ? Devant cet argumentaire bien peu solide, la délégation a donc rappelé avec force sa revendication : plus aucune OQTF pour aucun.e jeune scolarisé.e en Essonne ! Nous voulons au minimum un titre étudiant. La loi n’interdit pas une telle politique, puisque d’après l’ancienne préfète, qui avait reçu le collectif en audience le 20 mai dernier, tout préfet a un pouvoir discrétionnaire lui permettant de choisir de ne pas mettre d’OQTF. Dans le contexte politique actuel, l’abandon des OQTF apparaitrait comme un signe particulièrement positif. C’est ce signe que nous attendons. La directrice de cabinet de la préfète a indiqué que tous nos propos seraient rapportés à la Préfète et qu’elle serait attentive aux 10 dossiers de jeunes sous OQTF communiqués par la délégation.

À la sortie de l’audience, les publications suivantes ont été mises en ligne sur les réseaux sociaux :