Déclaration préalable – FSU 91

La colère des personnels, qui s’est massivement exprimée le 13 janvier, traduit le rejet de ce Gouvernement, dont le mépris pour nos professions s’incarne pleinement dans l’action du Ministre, depuis le début du quinquennat. Derrière la personne, c’est bien la politique de Macron, et de ses gouvernements successifs, mortifère pour les services publics, que nous combattons. Au-delà de la gestion de la crise sanitaire par le ministre, c’est bien la politique éducative qui est rejetée, qu’il s’agisse des moyens, des réformes éducatives, des atteintes à nos métiers. La grève historique du 13 janvier qui a mobilisé toute la communauté éducative a permis d’obtenir, sur quelques points, des premiers signes d’ouverture, de pure forme pour la plupart, mais inédits depuis le début de la crise sanitaire, et même depuis le début de la mandature. Le ton a changé. L’arc syndical large, la participation majoritaire au mouvement de grève, la mobilisation, au-delà des enseignants et des vies scolaires, des personnels d’encadrement, mais aussi le soutien de l’opinion publique : il aura fallu l’ensemble de ces éléments pour commencer enfin à entendre une nouvelle musique, dont nous devons maintenant obtenir qu’elle se traduise dans les faits. Nous ne pouvons pas nous en contenter ! Comment ne pas s’interroger sur cette façon de fonctionner ? Pourquoi la surdité et l’aveuglement sont-ils systématiquement des composantes de la gouvernance dans l’Éducation Nationale ? Les engagements pris au niveau ministériel concernant la communication avec les organisations syndicales doivent maintenant se traduire par des consultations régulières. Il est indispensable de sortir d’un dialogue social formel à l’issue duquel rien ne s’améliore, bien au contraire. Le changement doit être profond, notre institution en est-elle capable ?

Le protocole intenable a été un élément déclencheur dans l’expression massive du mécontentement de la profession. Or l’évolution de ce protocole est l’une des grandes absentes des engagements du Ministre. La procédure de tests, pour les élèves et personnels cas contacts, est illisible, ingérable, inefficace pour lutter contre la propagation de l’épidémie, et génère une désorganisation pédagogique insupportable. Il est urgent de mettre en œuvre des mesures à la fois protectrices, et qui permettent de redonner du sens au travail de tous les personnels, en le recentrant sur les missions pédagogiques et éducatives, l’école ne doit pas être cantonnée à un simple rôle de garderie. Le ministre Blanquer se targue médiatiquement d’être le ministre de l’école ouverte, c’est même devenu un totem qui empêche tout questionnement fin et toute discussion. On ne peut et on ne doit qu’applaudir, il ne nous reste qu’à nous prosterner devant tant de courage et de génie ! La réalité – n’en déplaise à notre ministre – est, sur le terrain, bien différente ! Les réformes qu’il a mises en place, les manques de moyens et les protocoles intenables ont contribué à profondément déstabiliser l’école depuis trois ans. Si les établissements sont restés ouverts, c’est grâce au travail des personnels et non grâce au ministre. Des masques FFP2 sont supposés être mis à disposition des AESH et des masques chirurgicaux doivent commencer dès cette semaine à être livrés pour tous les personnels ; il est prévu que l’État abonde le fonds de soutien des collectivités locales, pour leur permettre de procurer des capteurs de CO2 aux écoles et aux établissements. Avant que tout cela n’arrive, si cela arrive, une question s’impose, combien de temps avons-nous perdu ? Les personnels ne se sont jamais sentis protégés. Tout a été dit et même n’importe quoi ! Il a été affirmé qu’on ne se contamine pas à l’école ou si peu, bien moins en tous les cas que dans le cadre domestique puisque les contaminations se sont poursuivies pendant les vacances de Noël. Il a aussi été avancé que les professeurs étaient moins touchés que les autres catégories socio-professionnelles car bien protégés par les 49 protocoles, or il n’y a aucune étude récente sur cette question.

Du sanitaire au pédagogique, c’est la même insécurité qui s’exprime au quotidien sur le terrain. Le Ministère n’écarte pas la possibilité de reporter en fin d’année scolaire les deux épreuves de spécialité du baccalauréat et indique consulter le Conseil national de la vie lycéenne, en plus des organisations syndicales. Mais cette bataille est encore loin d’être gagnée. La FSU continue de dénoncer la réforme du baccalauréat qui fait perdre le sens de nos métiers et conduit à un baccalauréat maison qui accentue le tri social dans ParcourSup. La question des collégiens ne doit pas quant à elle être oubliée, la discontinuité pédagogique que vivent et ont vécu les élèves pendant cette crise sanitaire doit être prise en compte pour le DNB, par une adaptation des programmes et des épreuves. D’autant plus qu’une fois encore ce sont les élèves les plus fragiles qui sont le plus touchés, accentuant les inégalités sociales accrues par la réforme des collèges. Le manque de moyens est devenu impossible à masquer, mais la crise sanitaire n’en est que le révélateur, pas la cause. Ce manque de moyens résulte bien des suppressions d’emplois qui se sont succédé d’une rentrée à l’autre, alors que les effectifs globaux augmentaient. Les chiffres sont éloquents : 7900 postes en moins depuis 2017, l’équivalent de 175 collèges rayés de la carte. Ce sont des élèves en plus dans les classes ; des heures, des classes et des élèves en plus pour chaque enseignant, des remplaçants en moins. La dégradation des conditions d’enseignement et la discontinuité pédagogique n’ont pas débuté avec le COVID ! Une des réponses au mouvement historique du 13 janvier est la promesse de recrutements de personnels contractuels. La FSU dénonce le nombre insuffisant de recrutements prévu par le ministère. Ce sont bien les personnels les plus précaires qui servent de variable d’ajustement au MEN pour pallier les effets de sa politique libérale et sa gestion lacunaire de la crise sanitaire. La FSU exige que ces personnels soient reconnus et que le MEN accède à notre revendication d’un plan massif de titularisation, pour résorber la précarité. Le recours aux listes complémentaires, pour pourvoir aux besoins immédiats, a été annoncé. Il doit être mis en place concrètement et permettre les recrutements nécessaires. La réponse à la situation actuelle ne doit pas être le recours à la précarité. Nous rappelons notre revendication d’un plan pluriannuel de recrutement. Pour les AED et les AESH à qui on refuse un véritable statut, une revalorisation d’ampleur, la prime REP et REP+, nous exigeons une inversion de la politique menée pour les sortir de la précarité.

L’académie doit accueillir 3081 élèves de plus qu’à la rentrée 2021. Pourtant, 33 postes sont supprimés pour l’Académie de Versailles. Comme cela s’est déjà vu ces dernières années, le ministère réussit un tour de passe-passe et annonce malgré ces suppressions de postes 170 ETP supplémentaires pour l’académie. En réalité, cette progression apparente est produite par l’augmentation du nombre d’heures supplémentaires, et par la réforme des concours puisque les stagiaires se voient désormais imposer un service complet lors de leur année de stage. La formation des stagiaires et les conditions de travail sont donc sacrifiées au nom de principes purement budgétaires. Aucune remise en question de la politique de recours massif aux heures supplémentaires alors que de l’avis de tous elles dégradent les conditions d’enseignement et aggravent les problématiques de remplacement des personnels absents ou non nommés. Une nouvelle fois, ce sont les élèves les plus fragiles qui sont pénalisés par ces politiques, en particulier par les reprises de moyens en Éducation prioritaire. Le ministère a annoncé, il est vrai, la création de 300 emplois de CPE, répondant ainsi à une véritable urgence. 18 postes supplémentaires sont prévus dans notre académie pour la mixité scolaire, les internats et la création d’établissements. Même si l’Administration rompt enfin avec le gel du nombre de postes de CPE, ces créations restent bien en-deçà des besoins de l’académie, pour répondre aux enjeux éducatifs des années à venir. L’effort amorcé après cinq années de suppressions de postes doit s’amplifier, avec une programmation pluriannuelle des recrutements et avec l’augmentation du nombre de postes ouverts aux concours. Face au manque de professeurs remplaçants, le Ministère décide par ailleurs d’accroître la charge de travail des AED en finançant 1,2 millions d’HSE…. et propose aux AED d’assurer les remplacements des professeurs absents ! L’équivalent de 800 postes d’AED pour l’année 2022 : à l’heure où les vies scolaires sont sous tension faute de moyens, le Ministre fait le choix de la surcharge de travail sur les personnels déjà en poste ! Quel mépris, une fois de plus ! La question des moyens pour le Service public d’Éducation doit passer principalement par des mesures en faveur de personnels qui lui permettent de fonctionner dans le contexte sanitaire actuel, mesures qui viseraient à restaurer l’attractivité de nos métiers en mettant un terme aux politiques libérales menées ces dernières années par les gouvernements successifs.

Dans notre département, le CTSD bilan de rentrée qui s’est tenu en novembre dernier a fait état d’un écart important entre les prévisions d’effectifs pour 2021-2022 et les effectifs réels constatés à la rentrée : la hausse prévue s’est finalement avérée moins spectaculaire. C’est dans ce contexte qu’il faut analyser les DGH attribuées aux établissements de l’Essonne pour la rentrée prochaine. 1197 élèves supplémentaires sont attendus (+288 en collège, -24 en SEGPA, +933 en lycée). Plus que jamais, les élèves ont besoin d’un encadrement renforcé, d’un nombre d’heures d’enseignement majoré, pour combler et amortir les retards accumulés pendant la crise. À ce besoin, on répond par une reprise d’HSA pour augmenter l’enveloppe d’IMP que le Rectorat refuse d’abonder. On sacrifie donc des heures devant élèves pour rémunérer des missions qui ne font qu’alourdir la charge de travail des personnels. Après des années d’application d’un modèle d’allocation installé pour diminuer les heures devant élèves, nous déplorons qu’il n’y ait pas de rupture nette avec cette politique mortifère. C’est encore une occasion ratée. Si nous apprécions l’augmentation des heures postes et la baisse des HSA, nous ne pouvons que regretter que l’évolution du constat aux prévisions fasse état d’une reprise de moyens pour les collèges. Les personnels sont épuisés, les élèves sont en grandes difficultés et s’emparent de moins en moins de leur scolarité, le décrochage est évident et massif. Pour autant, dans notre département, des modèles inégalitaires se construisent et s’ancrent davantage dans le territoire. Le nouveau lycée de Palaiseau est devenu le LIPPS, changement hautement symbolique qui fait tomber le masque et justifie de façon odieuse le dépouillement des établissements alentours. La FSU, qui n’a cessé d’alerter sur cette politique délétère, soutient pleinement les personnels en lutte du lycée Camille Claudel de Palaiseau.